Un faux gourou prône la “masturbation énergétique” collective… sur un parking de Leclerc

(quand la quête du soi croise les caddies abandonnés)

Les parkings de supermarché, on les imagine plutôt peuplés de gens pressés, de poussettes à moitié pliées, de types qui cherchent leur voiture en marmonnant, et de gobelets Starbucks coincés entre deux rails de chariot. Mais à Cournon-les-Trous, une paisible bourgade périphérique où l’innovation spirituelle ne recule devant rien, un parking de Leclerc est récemment devenu le théâtre d’un moment mystique... et très gênant.

Un dimanche matin, 9h07, heure à laquelle le Leclerc ouvre mollement ses portes et où les clients viennent plus pour du PQ que pour l’éveil intérieur, une quinzaine de personnes se rassemblent entre les zones “Drive” et “bouteilles consignées”. Au milieu : un homme en toge couleur saumon, torse nu, pieds nus, et armé d’un bol tibétain et d’un micro-cravate. Il s’appelle Maître Orion, de son vrai nom Jacques-Daniel Blanchard, 53 ans, ancien vendeur de stores vénitiens, reconverti en “réharmonisateur cosmique” depuis qu’il a lu L’alchimiste de Coelho et un horoscope très convaincant en 2019.

Sa proposition ?
Un “rituel d’élévation vibratoire auto-centré”, autrement dit… une séance de “masturbation énergétique collective.”

— “Nous allons, par la puissance du souffle et du bassin, réchauffer nos chakras inférieurs. Vous allez toucher l’invisible... en vous-même. Et dans les autres, si affinité vibratoire.”

Le concept est simple (ou pas) : aucun contact physique — en théorie. Il s’agirait de se “stimuler intérieurement” par des mouvements amples, du souffle profond, et des sons gutturaux vaguement tantriques. Imaginez une chorégraphie entre le taï-chi, une scène de film muet interdit aux moins de 18 ans, et une démonstration d’essorage corporel.

Le tout entre des caddies.

Les passants, d’abord intrigués, s’arrêtent. Un monsieur venu pour acheter des piles AAA reste bouche bée. Une dame âgée filme discrètement avec son téléphone en hochant la tête comme si elle venait de tout comprendre sur l’humanité. Un enfant pointe du doigt en criant “Regarde maman, ils dansent en faisant pipi debout !”

Et là, on bascule doucement dans la légende locale.

Car Maître Orion, en pleine montée d’intensité (et de décibels), hurle à ses disciples de “projeter leur lumière vers le cosmos.” Ce que certains interprètent — avec un zèle malheureux — comme l’autorisation de se palper sans filtre. La masturbation énergétique devient soudainement… très concrète.

Les employés du Leclerc, visiblement pas formés à gérer des orgasmes ésotériques sur zone de livraison, appellent la sécurité. Puis la gendarmerie. En moins de 15 minutes, deux gendarmes arrivent, casque vissé, lunettes de soleil, et stupéfaction palpable.

— “C’est... un flashmob ?” demande le plus jeune.
— “Non, c’est un tsunami intérieur cosmique”, répond une participante en état de transe avec un bandeau sur les yeux.

Quatre personnes sont interpellées, dont Maître Orion, qui refuse de s’identifier autrement qu’en récitant son mantra personnel :

— “Je suis l’onde, le souffle, et le tremblement sacré.”

Ce qui, juridiquement, n’a aucune valeur, mais a au moins fait rire le brigadier.

L’interpellation est filmée. La vidéo devient virale sous le hashtag #ParkingDuPlaisir. Leclerc publie un communiqué très sobre :

“Nous rappelons que nos parkings ne sont pas prévus pour les pratiques méditatives à caractère suggestif. Merci de respecter les zones de stationnement.”